Cassini Grande Finale en direct de Caltech

La mission s’est terminée dans un silence complet où chacun retenait son souffle, suivi de quelques larmes et d’un tonnerre d’applaudissement. Clôturant un chapitre de l’étude de Saturne, de ses lunes et ses anneaux, la sonde spatiale Cassini a plongé vers Saturne le 15 septembre 2018, brûlant à son entrée dans l’atmosphère, tandis que sur Terre l’explosion du vaisseau a été constatée par le silence soudain du signal transmis.

Une foule de scientifiques et d’ingénieurs – dont certains ont participé au projet depuis ses débuts dans les années 1980 – se sont réunis au JPL et sur le campus de Caltech. Parmi eux se trouvaient certains membres des équipes UnivEarthS : Sébastien Rodriguez, Stéphane Le Moellic, Chloé Daudon, Cécile Ferrari, Sébastien Charnoz, Isabelle Grenier, etc. Levés au milieu de la nuit pour assister à la fin de la mission, ils ont observé les dernières minutes du vaisseau spatial.

 

«Depuis 13 ans, nous menons un marathon de découvertes scientifiques et nous sommes dans le dernier tour. », a déclaré Linda Spilker. Dans l’Auditorium Theodore von Kármán et sur le campus de Caltech, des écrans géants ont été installés pour permettre au public de suivre en direct les dernières minutes de Cassini depuis le Mission Control du JPL. Une atmosphère à la fois euphorique et tendue régnait sur la foule des scientifiques présents.

 

Alors que Cassini plongeait dans l’atmosphère de Saturne, son spectromètre de masse échantillonnait l’atmosphère pendant que le vaisseau luttait contre le frottement de l’atmosphère pour garder son antenne pointée vers la Terre (avec une transmission de 83 minutes retard).

Certains membres de l’équipe scientifique de Cassini retenaient leur souffle et d’autres l’encourageaient – « Donnez-moi juste quelques minutes de plus de données ! », « Regarde il y a encore du signal, il se bat toujours! ». Un silence total est tombé quand les pics de données se sont brusquement aplatis, d’abord sur la bande X, puis sur la bande S.

Le vaisseau spatial a été déclaré officiellement silencieux à 4 h 55, heure avancée du Pacifique, et on estime qu’il s’est complètement désintégré environ une minute plus tard.

“Je viens juste d’entendre que le signal a disparu, et le vaisseau va également disparaître dans les 45 secondes qui viennent. Je suis profondément fier de cet merveille accomplissement. Bravo à vous tous. Ceci a été une incroyable mission, un incroyable vaisseau spatial, et vous avez tous été une incroyable équipe. Projet manager, terminé.” Sur le campus, un tonnerre d’applaudissement a retenti après les derniers mots d’Earl Maize. Un moment à la fois précieux et triste pour la fin d’une mission qui a tant accompli, avec des boîtes de mouchoirs passées au milieu des sourires et des poignées de main.

 

Sébastien Rodriguez a résumé l’atmosphère de ce grand moment : « On arrive à la fin de cette nuit qui restera dans les mémoires, avec une pensée pour tous ceux qui nous ont accompagnés, de près ou de loin, de la première génération jusqu’à la plus récente des jeunes étudiants qui étaient avec nous aujourd’hui. C’est un petit peu la tristesse qui prédomine pour l’instant, la fierté, la chance d’avoir pu participer à cette aventure technologique et humaine absolument incroyable. Il nous faudra peut-être encore quelques heures, voire quelques jours, pour prendre du recul et réaliser la chance qu’on a eue… »

 

« On a passé une nuit fantastique, chargée en émotion… » nous dit Cécile Ferrari. « C’est une histoire de 20 ans voire plus qui se termine. On a une pensée particulière pour André Brahic, avec qui l’aventure a commencé à Paris 7. »

Cécile Ferrari et Sébastien Charnoz

 

Maintenant que la mission est terminée, l’équipe de Cassini enseignera aux futurs explorateurs ce qu’ils ont appris.”On est très contents de ce qui pointe à l’horizon. Il faut imaginer la quantité de données que la sonde Cassini a pu récolter. Ce sont des dizaines de terabytes de données qui sont archivées. Pour l’exemple, sur les données Voyager on a quelques gigas qui ont été récoltés, on a des thèses qui ont été soutenues sur ces données 20 ans après… donc on peut imaginer pour la sonde Cassini l’héritage qui reste à exploiter encore. La mission Cassini n’est pas finie en fait, elle ne fait que commencer !”

Sébastien Charnoz lui aussi envisage déjà l’avenir avec optimisme : « Bien que Cassini soit fini, on en aura peut-être pour deux ou trois générations à explorer l’ensemble de données, toute l’archive Cassini, qui est vraiment l’héritage de la mission. On a aussi des gens impliqués dans la mission Juyce pour explorer Ganymède, une des lunes de Jupiter, d’autres dans la mission pour explorer Phobos, une des lune de Mars… L’exploration du système solaire continue, avec notre université qui est partie intégrante de toutes ces missions. »