Il y a 4,5 milliards d’année, l’atmosphère primitive de la Terre ressemblait à celle de Vénus

Pour célébrer la fin d’année, le LabEx UnivEarthS propose de revisiter ses résultats marquants de l’année 2020. Pour la première étape de cette rétrospective, nous revenons sur la découverte par une équipe de chercheurs internationaux, dont issues de l’IPGP, révélant comment l’atmosphère primitive de la Terre devait être extrêmement riche en dioxyde de carbone, dans des proportions analogues à ce qu’on retrouve actuellement dans l’atmosphère de Vénus.

L’océan de magma à la surface de la Terre primitive a donné à notre planète sa première atmosphère © enriquelopezgarre / Pixabay

L’atmosphère actuelle de la Terre, composée principalement d’azote (N2) et d’oxygène (O2), est très différente de celles de ces planètes voisines, les atmosphères de Mars et Vénus étant saturées en dioxyde de carbone (CO2) avec une légère part d’azote. Comment expliquer cette différence fondamentale ? Pour cela, il faut remonter dans le temps.

Il y a environ 4,5 milliards d’années notre proto-Terre aurait rencontré une protoplanète de la taille de Mars (c’est de l’impact entre ces deux astres que naîtra par ailleurs la Lune). Cette collision est ci-importante que l’atmosphère originelle de la Terre s’évapore tandis que la surface est recouverte d’un océan de magma. Ce sont les interactions entre cet océan de magma et les vapeurs et gaz qu’elle relâche qui détermineront la composition de la nouvelle atmosphère terrestre. Mais comment connaître la composition de cette atmosphère ? Si de nombreux modèles d’atmosphère primitive ont été proposés, aucune ne fait consensus. Pour causes, les difficultés à reproduction en laboratoire des conditions extrêmes alors présentes sur Terre.

C’est pourtant le défi que s’est donné une équipe de chercheurs, dont des chercheurs de l’IPGP. Pour cela, ils ont dans un premier temps, recréé des roches en laboratoire dont la composition chimique est identique à celle du manteau terrestre. Ces échantillons de roche modèle, de seulement 2 mm de diamètre, sont ensuite soumises à des températures extrêmes, entre 1800 et 1850 °C, afin de reproduire les conditions de la Terre primitive et son océan de magma. Cette roche en fusion est a fortiori placé dans différents mélanges de gaz, conformes aux différentes atmosphères possiblement présentes à cette époque.

En comparant la composition de cette roche fondue avec des échantillons naturels de roches mantelliques (en particulier l’état d’oxydation du fer dans les roches), il est alors possible de déterminer sous quelle atmosphère était plongé l’océan de magma à la surface de la Terre il y a 4,5 milliards d’années. Résultat :  l’atmosphère primitive de la Terre aurait été ainsi principalement composé de monoxyde de carbone (CO) et de dioxyde de carbone. Puis, au fur et à mesure que la Terre s’est refroidit, l’atmosphère terrestre aurait pris une composition de CO2-N2 à des pressions et des proportions analogues à celles observées aujourd’hui sur la planète Vénus. Autrement-dit, des conditions loin d’être favorables à l’émergence de la vie.

Comment expliquer alors les changements atmosphériques qui ont conduit à la Terre que l’on connaît aujourd’hui ? La réponse est à chercher dans la position privilégiée de la Terre dans le système solaire, ainsi que de sa masse idéale. Des propriétés essentielles qui ont permis l’émergence d’océans, d’eau liquide cette fois-ci, pendant de très longues périodes. Ce sont ces océans qui ont absorbé une grande partie du CO2 présent dans l’atmosphère initiale terrestre, permettant ainsi le développement de la vie. Des conditions idéales que l’on ne retrouve pas sur Vénus.

Références :

Sossi, P.A., Burnham, A. D., Badro, J., Lanzirotti, A., Newville, M. & O’Neill, H.St.C. Redox state of Earth’s magma ocean and its Venus-like early atmosphere. Science Advances.
doi: 10.1126/sciadv.abd1387

Le LabEx UnivEarthS a contribué à cette recherche par le financement du projet Frontière “Multidisciplinary investigation of the deep Earth” (F7).