Phobos & Deimos : comprendre la formation des lunes de Mars
Sébastien Charnoz, professeur à l’Université Paris Diderot, chercheur à l’Institut de Physique du Globe de Paris et membre du projet UnivEarthS « De la poussière aux planètes », et une équipe internationale publient une étude sur l’origine de Phobos et Deimos, les deux lunes de Mars, dans Nature Geosciences. Ces travaux seront utiles pour définir les instruments de la prochaine mission spatiale japonaise vers Phobos.
On ne comprend pas très bien le processus de formation des satellites du Système Solaire. Pour ceux de Mars, il y a plusieurs hypothèses. La première est que Phobos et Deimos sont peut-être des astéroïdes capturés par un mécanisme inconnu. Mais ils orbitent exactement au-dessus de l’équateur martien, ce qui rend peu probable cette hypothèse. La seconde est d’imaginer un scénario de formation similaire à celui de notre propre Lune. Il y a environ 4,5 milliards d’année, la jeune Terre et une protoplanète seraient entrées en collision lors d’un impact géant, produisant de nombreux débris qui formèrent un disque autour de la proto-Terre exactement dans son plan équatorial. Ce dernier s’est refroidi et condensé, créant ainsi une protolune. C’est une hypothèse est plaisante, car c’est une manière simple de créer un satellite dans le plan équatorial. Cette idée appliquée à Mars est renforcée par la présence d’un gigantesque bassin d’impact dans son hémisphère nord. Cela a servi de fil conducteur à notre étude. Mais il reste à expliquer pourquoi Phobos et Deimos sont si différents de notre Lune, pourquoi Phobos orbite si près de Mars (à 3 rayons martiens) et Deimos est si lointain (à 7 rayons martiens) avec un grand espace entre les deux.
A l’origine : une grosse lune
Les simulations couplées des deux disques montrent que les grosses lunes internes formées à 3 rayons martiens agitent suffisamment le disque externe pour emballer l’accrétion en formant exactement 2 lunes dans des régions particulières appelées « résonances ». Ensuite, les marées martiennes déplacent les satellites. Toutes les lunes formées en dessous de l’orbite synchrone, dont Phobos, chutent vers Mars, mais Deimos s’étant formé juste au-dessus de l’orbite synchrone il est repoussé vers l’extérieur. Après 4 milliards d’années d’évolution, il ne reste plus que Phobos et Deimos à leurs positions actuelles.
Vers l’exploration spatiale
La formation des lunes de Mars en vidéo :
La plateforme S-CAPAD
Le service de Calcul Parallèle et de Traitement de Données en sciences de la Terre (S-CAPAD) est un instrument scientifique et service transversal de l’IPGP qui permet aux étudiants et chercheurs, de développer et d’exploiter leurs applications de modélisation et d’analyse des données issues des observations ou de la simulation numérique. Il dispose aujourd’hui de 130 noeuds de calcul totalisant plus de 2000 coeurs avec une puissance crête de 47 Tflops, 10 To de mémoire et près de 1 Po de stockage parallèle, le tout connecté par un réseau haute performance. Ces ressources sont ouvertes aux membres de l’IPGP, à ses collaborateurs extérieurset aux membres de la COMUE USPC ; elles sont donc intégrées à la plateforme CIRRUS.Pour plus d’informations, voir http://webpublix.ipgp.fr/rech/scp/.
Accretion of Phobos and Deimos in an extended debris disc stirred by transient moons, Pascal Rosenblatt, Sébastien Charnoz, Kevin M. Dunseath, Mariko Terao-Dunseath, Antony Trinh, Ryuki Hyodo, Hidenori Genda & Stéven Toupin. Nature Geoscience, 4 July 2016. DOI: 10.1038/ngeo2742